dimanche 31 octobre 2010

WikiLeaks dévoile des documents révélant les crimes de guerre des États-Unis en Irak

dimanche 31 octobre 2010 - 05h:36
Patrick Martin - WSWS



Les dossiers confidentiels de l’armée américaine rendus publics vendredi par le site web WikiLeaks documentent exhaustivement le caractère criminel de l’invasion et de l’occupation de l’Irak menées par les États-Unis.





WikiLeaks a publié près de 400.000 rapports d’enquête militaires, rédigés par des soldats de bas rang après des opérations de combat ou de reconnaissance, qui décrivent les pertes de vies humaines dues aux actes de l’armée des États-Unis, aux attaques des insurgés anti-américains ou au conflit civil fratricide déclenché par l’occupation américaine. Les rapports couvrent la période allant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2009, et ne fournissent donc pas d’information concernant les massacres perpétrés durant l’invasion initiale par les États-Unis en mars 2003.
Certains journaux et médias ont pu avoir accès aux documents plusieurs semaines à l’avance, y compris le Guardian de Londres, le New York Times, le magazine de nouvelles allemand Der Spiegel, le quotidien français Le Monde et Al Jazeera, le diffuseur de langue arabe basé au Qatar. Vendredi soir, ceux-ci ont publié de longs extraits sur leurs sites web du matériel dévoilé.
Le Guardian porte son attention sur l’ampleur du carnage, dont l’existence de 15.000 civils tués dans des incidents qui n’avaient pas été initialement rapportés par l’armée américaine (qui niait publiquement même faire le décompte des morts civiles, alors qu’elle en conservait un dossier détaillé). L’article du journal commence par les mots suivants : « Un sinistre portrait de l’héritage des États-Unis et de la Grande-Bretagne en Irak a été dévoilé par une immense fuite de documents militaires américains qui décrivent en détail la torture, des exécutions sommaires et des crimes de guerre. »
Le quotidien ajoute ensuite : « Les rapports de guerre, consultés par le Guardian, contiennent un horrible dossier regroupant des cas où des soldats américains ont tué d’innocents civils à des points de contrôle, sur les routes irakiennes et durant des raids dans des résidences. On dénombre parmi les victimes des dizaines de femmes et d’enfants. Les États-Unis ont rarement fait part de ces morts publiquement . »
Le Guardian décrit aussi le fait que l’armée des États-Unis n’a pas fait enquête sur la torture et les meurtres des forces irakiennes, recrutées dans la construction du régime fantoche à Bagdad. Le quotidien déclare : « De nombreux rapports de mauvais traitements contre les détenus, souvent appuyés par des preuves médicales, décrivent des prisonniers attachés, un bandeau sur les yeux et pendus par les poignets ou les chevilles, et recevant des coups de fouet, des coups de pied et de poing ou des décharges électriques. Six rapports se terminent par le décès manifeste d’un détenu. »
Un autre article du Guardian porte attention au rôle de la Wolf Brigade, une unité de forces spéciales irakienne créée par l’armée américaine et dirigée par le Colonel James Steele, dont l’expérience de contre-insurrection, torture et meurtre comprend son rôle comme conseiller de l’escadron de la mort soutenu par les États-Unis au Salvador au cours des années 80.
Selon le journal : « La Wolf Brigade a été créée et supportée par les États-Unis dans une tentative d’utiliser des éléments de la garde républicaine de Saddam Hussein, cette fois dans le but de terroriser les insurgés. Les membres portent généralement des bérets rouges, des verres fumés et des cagoules puis partaient faire leurs raids en convoi de Toyota Lancruisers. Ils ont été accusés d’avoir battu des prisonniers, les avoir torturés avec des perceuses électriques et parfois d’avoir exécuté des suspects ».
Le rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Manfred Nowak, a dit au programme télévisé de la BBC Today que le gouvernement américain a l’obligation de mener enquête sur les allégations que l’armée américaine remettait des prisonniers aux gardiens de prison irakiens pour qu’ils se fassent torturer et exécuter, non seulement pour « traîner les auteurs de ces crimes en justice, mais aussi pour que la situation des victimes puisse être corrigée et les réparations adéquates faites ». Omettre de le faire, a-t-il dit, violerait les obligations des États-Unis sous la loi internationale.
Cette violation des droits de l’Homme continue sous l’administration Obama, comme le confirment les documents, avec un rapport mentionnant que l’armée américaine a reçu en décembre dernier une vidéo montrant un officier de l’armée irakienne exécutant un prisonnier à Tal Afar, en Irak du Nord. Selon le journal de l’armée américaine, « l’enregistrement montre approximativement 12 soldats de l’armée irakienne. Dix soldats de l’AI (armée irakienne) parlaient entre eux pendant que deux soldats retenaient le détenu. Le détenu avait les mains liées... l’enregistrement montre les soldats de l’AI amener le détenu dans la rue, le jeter au sol, le frapper et lui tirer dessus ».
Les journaux concluent « qu’aucune investigation n’est nécessaire », car aucun soldat américain n’a été impliqué dans la torture ou les meurtres. Il s’agit de l’application d’une politique officiellement adoptée par l’armée américaine en 2004 sous un ordre militaire connu sous le nom de FRAGO 242.
Le Guardian écrit que les rapports de l’armée, même s’ils sont macabres, sous-estiment de manière significative le nombre de morts dues aux actions militaires américaines, même en les comparant aux statistiques produites par le Iraq Body Count (IBC), qui sont très au-dessous des estimations, basées sur des études démographiques, d’un million ou plus d’Irakiens tués. Le journal écrit : « Un exemple clé de l’échec des forces armées américaines face à l’enregistrement du nombre de morts et de blessés civils qu’elles ont infligé apparaît dans deux batailles urbaines majeures contre des insurgés à Fallouja en 2004. Plusieurs édifices ont été réduits à des amoncellements de débris par des frappes aériennes, des obus de chars d’assaut et des obusiers et il y a eu des centaines de morts de civils. Ceci est un fait bien établi. IBC a identifié entre 1226 et 1362 morts reliées à ces événements en avril et en novembre. Mais, les rapports d’événements pour usage interne des Etats-Unis qui viennent d’être publiés ne rapportent aucun mort ou blessé civil. »
Le Guardian et Der Spiegel ont publié des bilans des morts et des blessés de tous types infligés pendant une seule période de 24 heures pendant l’automne 2006, la période où la guerre civile était la plus intense et lorsque les tueries sectaires entre les sunnites et les chiites étaient à leur sommet. Le Guardian a choisi le 17 octobre 2006, jour où 146 personnes ont été tuées ; Der Spiegel a examiné le 23 novembre 2006, où 318 personnes sont mortes. Chacun a donné comme titre « Une journée en enfer » à leur résumé. Il n’y a pas de ce genre de reportage dans le New York Times.
Le Guardian et Der Spiegel ont en particulier souligné un incident notoire dans lequel des hélicoptères de combat Apache de l’armée américaine avaient piégé deux insurgés qui tentaient de se rendre. Lorsque le pilote a communiqué avec sa base pour avoir des instructions, un avocat de l’armée lui a dit qu’« ils ne peuvent se rendre à des aéronefs et qu’ils sont toujours des cibles ». Les deux hommes se sont sauvés, mais l’hélicoptère les a chassés et les a mitraillés au sol pour finalement les tuer.
Dans son analyse des rapports de l’armée, Al Jazeera a classifié tous les moments dans lesquels les soldats ont tiré et tué des civils irakiens à des points de contrôle le long des autoroutes - arrivant à un total de 681, plusieurs d’entre eux des femmes et des enfants. Plusieurs de ces meurtres ont eu lieu dans des massacres de familles entières, le pire impliquant 11 personnes dans une camionnette, incluant quatre enfants.
La différence est grande entre l’approche des médias européens et arabes et celle du New York Times, approche qu’a ensuite suivi la plus grande partie des médias américains. Les médias hors Amérique ont tous insisté, comme il se doit, sur l’horreur du bain de sang qui a suivi l’invasion menée par les Américains et sur l’importance du matériel publié pour documenter les crimes de guerre.
Le New York Times cherche a détourné l’attention des preuves de la criminalité du gouvernement Etats-Unis, combinant les diversions - comme la suggestion que les documents offrent de nouvelles preuves de l’implication de l’Iran en Irak - et les questions secondaires - la première page portant sur le rôle des sous-contractants privés - avec une campagne de salissage contre le fondateur de Wikileaks, Julian Assange. (Voir “New York Times tries character assassination against WikiLeaks founder Assange”)
Les médias américains ont en général combiné la vilification de WikiLeaks avec des tentatives de minimiser la signification du matériel publié. Les couvertures du New York Times et du Washington Post commencent avec l’assertion qu’il y peu d’informations qu’on ne connaissait pas déjà dans les documents de l’armée, une assertion qui semble contredite par les condamnations publiques du Pentagone et de la secrétaire d’État Hillary Clinton de la publication des documents.
Un autre thème de la couverture que l’on trouve dans les médias américains est celui que le matériel publié par WikiLeaks justifierait la prolongation de la présence américaine en Irak, car il démontre que la police et l’armée irakienne, sous le contrôle du premier ministre Malili, sont des forces criminelles qui ne respectent pas la loi.
C’est ainsi que le Washington Post écrit : « Mais l’aspect le plus troublant des rapports publiés est peut-être le portrait qui est fait du gouvernement irakien ayant pris le contrôle de l’appareil de sécurité alors que les forces américaines se retirent. » Et le New York Times suggère lui que plus de détails sur les conflits entre Kurdes et arabes au Nord de l’Irak pourrait soutenir l’idée qu’il faut des troupes américaines dans cette région en tant que gardiens de la paix. »
Malgré la censure et la distorsion des médias américains, la vérité sur la nature criminelle des guerres américaines en Irak et en Afghanistan atteint un public de plus en plus grand. De par le monde, le gouvernement américain est perçu comme suivant les méthodes des nazis, tant par sa violence que par ses mensonges systématiques et éhontés.
WikiLeaks a rendu un immense service à toute la population. Il a mis en ligne des documents fournissant le matériel pour amener ultérieurement les présidents américains Barack Obama, George W. Bush, et les dirigeants de l’armée, des agences du renseignement et du secrétariat d’Etat responsables de la politique étrangère devant les tribunaux pour crimes de guerre.

Sur le même thème :

29 octobr 2010 - World Socialist Web Site - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.wsws.org/francais/News/2...

samedi 30 octobre 2010

Irak - Réflexions sur les War Logs
 
(1ère partie)
 
  (« Le blues d’une femme Arabe »)
 
Cet écrit pourrait être le premier d’une série de publications sur le sujet ; je ne suis pas encore fixée. Je reste libre de laisser fuir mes pensées comme bon me semblera…
Le 23 octobre 2010, la publication par WikiLeaks de documents classés de l’armée américaine a représenté pour moi un tournant important, autant sur le plan personnel qu’en tant qu’irakienne. Certes je ne suis pas la seule concernée, je connais d’autres irakiens qui se sont sentis un TANT SOIT PEU soulagés.
L’un d’eux s’est exprimé à cet égard sur Twitter : « Je vous aime WikiLeaks, désormais je pourrai peut-être dormir un peu plus en paix ».
Sans que je sache d’où, ces mots sont sortis de ma bouche : « Nous demandons aux États-Unis et à l’Iran d’expliquer pourquoi ils nous ont tués, torturés, violés et exilés ».
En tant qu’irakienne, j’ai eu le sentiment de me réveiller lentement d’un long cauchemar. Ce sentiment ne m’a pas lâché de la nuit…quelque chose me rongeait les tripes. Il fallait que ça sorte.
Ce quelque chose, ce n’était ni la rage ni la tristesse qui m’habitent habituellement, mais bien plus…d’où ce texte.
J’ai passé de longues heures à parcourir les rapports de la Guerre, ou « War Logs », sur le site Web de WikiLeaks. Je les ai lus et relus, même si les noms ont été supprimés…sachant pertinemment que cette fuite ne retrace que de manière infinitésimale ce qui s’est réellement passé, et ce qui se passe encore…
Il n’empêche que je les ai parcourus de long en large, pas dans leur totalité, mais en les filtrant et en les choisissant, au hasard...
Dans les temps anciens, où les récits écrits n’existaient pas, l’Histoire s’écrivait de manière orale…par transmission, ce que l’on appelait « l’historiographie orale ». Les War Logs s’apparentent en quelque sorte à une transmission orale des événements, tels qu’ils se sont déroulés...
Et dans les temps anciens, à partir de cette transmission orale d’événements historiques, les gens étaient en mesure de se faire une idée de ce qui se passait. Avec les War Logs, c’est pareil. Même si les noms ont été supprimés, des indications de lieux et de dates y sont données à partir desquelles il est possible de dépeindre un tableau de la situation, un tableau plus précis je dirai…
Mais pourquoi cette démarche s’est-elle imposée à moi ?  Après tout, les fuites viennent simplement CONFIRMER ce que j’écris dans ce blog depuis des années. Pourquoi ai-je eu besoin de cette confirmation publique des événements, venant d’une instance supérieure, après sept ans de carnage, de torture, de viols et d’exil ?
Pourquoi ce concitoyen irakien a-t-il dit : « désormais, je pourrai peut-être dormir un peu plus en paix » ? Il est certain pourtant que ces documents classés n’ont révélé rien de plus que ce qu’il ne savait déjà.
Je me suis endormie en ruminant ces questions, puis j’ai fini par comprendre…
Avez-vous le souvenir, à un moment ou à un autre de votre vie, d’avoir été témoin de quelque chose d’épouvantable, de l’avoir signalé, d’en avoir parlé sans que personne ne vous croit ? Même ceux qui vous étaient proches, ou que vous croyiez proches, ne vous ont pas cru. Sans répit, vous avez répété ce que vous avez vu, personne n’a cru un mot de ce que vous disiez.
Or, cette vérité dont vous avez été témoin, vous ne vous êtes jamais résolu à l’oublier. Certains vous ont ridiculisé, vous ont traité de tels ou tels noms, vous ont fait taire, vous ont menacé de vous tuer, vous ont collé une étiquette de menteur(se), vous ont accusé de mythomanie ou de conspiration personnelle…Et au ridicule, se sont ajoutés la minimisation et la déformation des faits, ainsi que la culpabilisation : « voyons, ce n’est rien de grave » ou « rien de tout cela ne s’est passé », « tout cela n’est que mensonge et source de problèmes »...et parfois la pression était telle que vous commenciez à vous demander si, après tout, vous n’aviez pas des tendances mythomanes…que peut-être vous aviez mal vu, que tout cela n’était qu’une illusion...En d’autres termes, lorsque vous avez apporté la vérité, ces personnes vous ont ôté toute crédibilité et vous ont fait douté de la véracité de votre récit. Il vous est arrivé de vous murer dans un silence d’autiste ou de parfois surcompenser par une attitude encore plus provocatrice…pourtant vous vous sentiez terriblement seul(e).
Mais vous avez tenu bon, vous n’avez pas lâché prise...et même terriblement seul(e), vous avez réalisé, dans cette démarche d’entêtement et d’obstination, à quel point les faits ont été étouffés. ÉTOUFFÉS.
En même temps, plus vous creusez les faits, plus vous prenez conscience d’autres facteurs encore plus importants : les réseaux, alliances et autres guerres en marge de cette dissimulation. C’est alors que vous comprenez : plus la dissimulation s’installe, plus le mensonge grossit, plus la minimisation enfle, plus les omissions s’accumulent, plus la Vérité devient synonyme de danger. La Vérité derrière ce qui s’est passé et ce qui se passe encore.
Et à un moment précis dans le temps, une voix, une instance bienveillante vient vous conforter en vous disant : « J’ai une histoire à raconter » et dans un langage cryptique, vient répéter votre vérité et la révèle au grand jour. Vous devez encore lire entre les lignes, mais dans votre for intérieur, vous pensez : « Enfin, je ne suis plus seul(e). Enfin, tout ce que je croyais n’être que le fruit de mon imagination, se révèle être la Vérité ».
Alors le fardeau devient un peu moins lourd à porter ; vous avez le sentiment que le cauchemar se termine et que vous pourrez dormir un peu plus en paix.
C’est ce qui s’est passé le 23 octobre 2010 pour de nombreux irakiens qui portaient seuls le fardeau de leur Vérité : ils s’en sont déchargé d’une petite partie et ont pu ainsi espérer dormir plus tranquillement en osant imaginer, comme je l’ai moi-même fait, que peut-être - peut-être - un jour se réveilleront-ils de leur cauchemar en solo…
Dans la prochaine publication, j’aborderai les War Logs proprement dits et certaines informations importantes concernant le nettoyage ethnique, le rôle de l’Iran et les autres mini-guerres qui se sont déroulées dans le cadre de la Guerre elle-même : l’Occupation et la Destruction de l’Irak. Inchallah.
 
Traduction : Magali Fauchet
 
Par Gilles Munier
 

PRESS RELEASE
 
 
Date: 30 October 2010
 
 
LEGAL ACTION IS UNAVOIDABLE
 
 
To all victims of the US-UK invasion of Iraq and their families,
 
To all Iraqis,
 
To all Parties of the Genocide Convention, the Four Geneva Conventions and the UN Convention against Torture,
 
To all progressive lawyers, legal associations and institutions, parliamentarians, international civil servants, and everyone who supports legal action to ensure redress for Iraqi victims of US-UK crimes:
 
Just over a year ago, we submitted a legal case before the Audencia Nacional in Madrid under laws of universal jurisdiction against four US presidents and four UK prime ministers  George H W Bush, William J Clinton, George W Bush, Barack H Obama, Margaret Thatcher, John Major, Anthony Blair and Gordon Brown  on charges of war crimes, crimes against humanity and genocide in Iraq. This case was based on our analysis of hundreds of documents available in the public domain, along with firsthand witness testimony that informed our effort and our designation of US-UK actions as genocide.[1]
 
The essence of our case was that the accumulated pattern of harm, stretching over 19 years, revealed a clear and specific “intent to destroy”, in whole or in part, the state and nation of Iraq. We catalogued the purposive dismantling of the Iraqi state and the imposition, incitement and engineering of sectarian conflict. We also described the systematic destruction of Iraq’s civil infrastructure, added to the massive use of depleted uranium, which from 1990 onwards led to millions of excess deaths. We outlined the use of disproportionate and indiscriminate force, the use of internationally prohibited weapons such as white phosphorus, and the use of prohibited means and methods of warfare. And we identified the use of death squads and armed militias associated with political forces promoted by and protected by Washington, the terror that led to the forced mass displacement of five million Iraqis, and the institutionalised regime of mass and arbitrary detention and torture, along with blackmail, kidnapping, rape and unfair trials, that characterised Iraq under US occupation.
 
The Wikileaks disclosure
The near 400,000 classified documents that Wikileaks recently published substantiate the claims we made in our case and constitute official US evidence of elements of the case we presented: the existence in Iraq of a regime of systematic torture; rape used as a weapon of warfare and terror; incidence of arbitrary, summary and extrajudicial executions; the routine use by US armed forces of indiscriminate and disproportionate force; the alarming collapse of the division between military and civilian targets, with two thirds of the victims registered in the leaked documents being acknowledged as civilians. We will add these documents to our archive of evidence.
 
But these documents alone must be situated. While adding to the picture of the real war conducted, they do not contain it.
 
1. Inevitably, the leaked documents tell the story of the Iraq war from the perspective of  and within the confines of  the US military and its record-keeping practice. One cannot expect this practice to be anything but influenced by US Army culture and the operational goal of winning the war.
 
2. The leaked documents do not cover the actions of the CIA and other non-US Army agencies in the Iraq war, or similar agencies of foreign powers.
 
 
 
5. The leaked documents provide raw data on day-to-day operations but do not contain information on the strategic planning or aims of the war.
 
 
7. The leaked documents do not collate the overwhelming bulk of the killing in Iraq, which involved militias incorporated into the new Iraqi Security Forces led by Iraq’s puppet governments  among which that of Nouri Al-Maliki  and for which the US, as the occupying power, is legally responsible.
 
8. The leaked documents do not cover the orchestrated plunder of national and individual property, individual appropriation of state property, arbitrary dismissal and refusal of work, and the mass non-payment of salaries and withdrawal of social rights. Nor do the documents shed light on the collapse of Iraq’s economy, and the consequent mass impoverishment and displacement of Iraqis.
 
9. The leaked documents do not cover non-violent excess deaths in Iraq, whether the result of the collapse of Iraq’s public health system, the contamination of Iraq’s environment, including by radioactive munitions, and the spread of disease amid the overall collapse of all public services, including provision of electricity, a functioning sewage system, and clean water.
 
 
Demand for legal action
At present, there is a full-scale damage limitation effort ongoing, headed by the US Pentagon and involving: attempts to focus attention away from the detail of the leaked documents and onto the founder of Wikileaks and his person; to focus attention on the failure to act against torture when it involved Iraqi police and paramilitary forces, ignoring US practices of torture or the culture of violence the US occupation has promoted overall (including by specifically training and arming death squads and militias); and to divert attention to the role of Iran while failing to contextualise the cooperative relation between the United States and Iran in the destruction of Iraq.
 
Despite US manoeuvres, the United States administration and the government of Iraq stand equally accused. Neither can be trusted to investigate the facts contained in the classified documents Wikileaks has brought into the public domain. Only action that invokes the universal jurisdiction of the conventions the US and Iraqi governments have violated in Iraq can be satisfactory and objective. And only by stepping back and reviewing the whole period, from 1990 through until now, can one adequately situate the Wikileaks Iraq War Logs and understand their importance.
 
Wikileaks has done a tremendous service to truth in times of war, and has placed before us raw evidence that is compelling, undeniable, and that tells  in part  the story of the Iraq war in a way until now untold. We salute Wikileaks and its sources for the courageous act of releasing the classified Iraq War Logs. We call on all lawyers, judges and juridical institutions to display equal courage, and in coalition to work towards the swift prosecution of US and UK war crimes, crimes against humanity and genocide in Iraq. We believe that only by coordinated action can those responsible for grave crimes and rights violations in Iraq be held accountable.
 
We therefore call for the formation of an international coalition of lawyers, legal specialists and antiwar and anti-occupation progressive forces to realise this obligation.
 
We are ready to cooperate with and join any effort that aims to ensure redress and reparations for Iraqi victims of US and UK crimes.
 
There is no excuse now for failing to take legal action everywhere it is feasible, both at the national level  where the universal jurisdiction of international conventions permits  and beyond. But legal action must be informed by an analysis of the nature of the war as a whole, and by the testimony not only of the US Army, but also Arab and international solidarity groups and associations, and foremost the Iraqi people  the victims of the US-led war of aggression on Iraq.
 
 
Ad Hoc Committee for Justice for Iraq
 

 
Dr Ian Douglas, coordinator of the International Initiative to Prosecute US Genocide in Iraq and member of the Executive Committee of the BRussells Tribunal
Hana Al Bayatymember of the Executive Committee of the BRussells Tribunal and the International Initiative to Prosecute US Genocide in Iraq
Abdul Ilah Albayaty, political analyst and member of the Executive Committee of the BRussells Tribunal
Serene Assir, member of the Advisory Committee of the BRussells Tribunal
Dirk Adriaensens, member of the Executive Committee of the BRussells Tribunal
 
 
 

lundi 25 octobre 2010

Révélations WikiLeaks : comment les Etats-Unis couvrent l’usage de la torture en Irak

dimanche 24 octobre 2010
Gregg Carlstrom - Al Jazeera
 

Un militant présumé identifié seulement comme « DAT 326 » a été arrêté par l’armée irakienne le 7 Juillet 2006, à un poste de contrôle dans la ville de Tarmiya, au nord de Bagdad. Lorsque les forces américaines l’ont interrogé plus tard dans la nuit, il a décrit les heures de violence brutale aux mains des soldats irakiens, une accusation apparemment confirmée par les résultats d’un examen médical.
DAT 326 raconte qu’on lui a dit de s’allonger sur le ventre avec ses mains attachées derrière son dos, après quoi les soldats irakiens lui auraient marché et sauté dessus, auraient uriné et craché sur lui.
[...] DAT 326 a été ausculté et traité pour ses blessures à Cobra Clinic. Les blessures ont pour conséquence une vision floue, une perte d’audition dans l’oreille gauche, des saignements dans les oreilles, des ecchymoses sur le front, le cou, la poitrine, le dos, les épaules, les bras, les mains et les cuisses, des coupures sur l’œil gauche et sur les lèvres supérieure et inférieure, une hémorragie aux yeux, du sang dans les cavités nasales, et les mains et poignets gonflés.
Devant les accusations de torture commises par les forces irakiennes, les Etats-Unis ont rapidement écarté la question : « En raison d’aucune allégation ou preuve d’implication des États-Unis, une enquête des Etats-Unis n’est pas engagée », indique le rapport.
Un examen des documents divulgués révèle plus de 1000 accusations d’abus commis par les forces de sécurité irakiennes. Certaines d’entre elles ne sont pas crédibles, car certains détenus n’ont montré aucun trace physique de ces abus, tandis que d’autres ont modifié leur récit au cours des multiples interrogatoires.
Mais des centaines d’accusations - comme « DAT 326 » - sont corroborées par des auscultations médicales et autres preuves. Ces rapports montrent une tendance claire d’abus et de tortures dans les prisons irakiennes, et qu’une directive de haut niveau venue du Pentagone interdit aux forces américaines de procéder à des enquêtes.
« Seul un rapport initial sera effectué »
L’instruction de ne pas enquêter apparaît dans la directive fragmentaire [FRAGO] 242, avec une première mention dans un rapport déposé le 16 mai 2005.
Si le rapport initial confirme que les forces américaines n’ont pas été impliquées dans les mauvais traitements de détenus, aucune investigation complémentaire ne sera effectuée sauf si commandée par le HHQ.
L’ordre est à nouveau mentionné dans un rapport de juin 19, qui dit que « seul un rapport initial sera fait pour des violations apparentes [aux les lois de la lutte armée]... n’impliquant pas les forces américaines. » Ces premiers rapports ont été suffisamment fréquents pour établir que la torture a été utilisée, et les résultats des entrevues et des examens médicaux ont été rapportés dans un détail macabre, comme un rapport de juillet 2006 au sujet d’un détenu à Bagdad soupçonné d’être un combattant étranger.
Tout complément d’enquête, cependant, demande l’approbation des supérieurs et une telle approbation a été rarement donnée. Ainsi, les États-Unis n’ont guère contribué à répondre des abus commis par des soldats et des policiers irakiens. Des centaines de rapports sur la torture se concluent avec la phrase : « l’accusation est transmise au commandant [de l’armée irakienne] aux fins d’enquête ».
Le département d’État américain, en effet, a souligné à maintes reprises que le gouvernement irakien ne tient pas compte des rapports de tortures et mauvais traitements. « Il y a peu d’indications que des mesures disciplinaires aient été prises contre les forces de sécurité accusées de violations des droits de l’homme », écrit le ministère dans son rapport de 2007 sur la situation des droits de l’homme en Irak.
Cela a lentement commencé à changer - en 2009, le ministère de l’intérieur en Irak a ouvert 55 enquêtes sur les violations des droits de l’homme - mais des rapports du département d’État des États-Unis montrent que les abus signalés au ministère irakien de l’intérieur ont été ignorés pendant des années.
Violation des obligations liées à la Convention des Nations Unies contre la torture
Le droit international n’exige pas des États-Unis d’enquêter sur ces accusations d’abus à l’encontre de détenus irakiens, parce que toutes ont été rapportées après le 30 Juin 2004 - quand l’Irak est redevenu un « pays souverain », selon la résolution 1546 des Nations Unies [on s’étonnera ensuite que les Nations Unies puissent être prises pour cible par la résistance irakienne... N.d.T]. Les États-Unis ne contrôlait plus directement les services de sécurité d’Irak, et donc, il n’était plus obligés de gérer ce qui s’y faisait.
On pourrait argumenter, bien sûr, que la décision de regarder ailleurs représente une faute morale claire - et une décision délibérée de saper le but affiché des États-Unis de construire une nation. Les États-Unis ont dépensé des dizaines de millions de dollars pour développer les prisons, les tribunaux et la « règle de droit » en Irak. Mais la divulgation de ces documents montrent que les forces de sécurité irakiennes ont systématiquement violé les droits les plus élémentaires des détenus sous leur garde, les agressant, menaçant leurs familles, allant jusqu’à les enlever ou les assassiner.
Plus important encore, de nombreux récits de tortures donnent à penser que les États-Unis ont sciemment contrevenu à la Convention des Nations Unies contre la torture.
La convention - ratifiée par les États-Unis en 1994 - interdit aux signataires de transférer un détenu dans d’autres pays « où il y a des motifs sérieux de croire qu’il serait en danger d’être soumis à la torture ».
Parmi les plus de 1000 accusations de torture dans les prisons irakiennes, beaucoup d’entre elles sont étayées par des preuves médicales et paraissent bien constituer des « motifs sérieux » de croire que les prisonniers remis aux autorités irakiennes pourraient être torturés. Pourtant, les États-Unis ont transféré des milliers de prisonniers aux autorités irakiennes ces dernières années, dont près de 2000 ont été remis aux Irakiens en juillet 2010.
« Preuve de tortures »
Les tortures dénoncées par les détenus sont souvent presque identiques à celles utilisées par le régime déchu de Saddam Hussein. Certains détenus ont été fouettés sur les pieds avec de lourds câbles, une forme de torture atrocement douloureuse mais qui ne laisse que quelques traces sur les victimes. D’autres ont déclaré avoir été suspendu à des crochets fixés au plafond ou d’avoir subis des chocs électriques sur leur corps.
Le détenu 1x dit qu’il a été enlevé à son domicile par l’IA [service de renseignement de l’armée irakienne] dans le district de Khalis dans la province de Diyala. Il a ensuite été détenu dans des bunkers souterrains pendant environ deux mois jusqu’en août 2005 et soumis à la torture par des membres de l’IA 2/5. Parmi les allégations de tortures [sic] on trouve entre autres, la strapado stress position, où le détenu avait les mains liées et était suspendu au plafond, l’utilisation d’objets contondants (comme des tuyaux) pour le battre sur le dos et les jambes, et l’utilisation de perceuses électriques pour perforer les jambes.
L’agression sexuelle, ou la menace d’y recourir, est une tactique habituelle pour les interrogateurs. Un détenu a déclaré avoir été sodomisé avec une bouteille d’eau ; un autre, avec un tuyau.
Un certain nombre de rapports parlent de l’existence « de salles de torture » dans les commissariats et installations de l’armée à travers le pays.
Une preuve que la torture n’est pas interdite a été notée dans la station de la police irakienne dans Husaybah, IZ. De grandes quantités de sang sur le sol, un fil utilisé pour les chocs électriques et un tuyau de caoutchouc se trouvaient dans la cellule de détention.
Les forces américaines ont occasionnellement agit pour faire cesser les abus commis par les forces de sécurité irakiennes : en août 2005, par exemple, une patrouille de l’armée américaine a arrêté un groupe de soldats irakiens qui battaient à coups de poing un détenu sous leur garde.
Une telle intervention est plus une exception que la règle. Un rapport d’août 2006 cite le sergent Andrew Spade, de la 300e compagnie de la police militaire, qui voit des policiers irakiens fouetter et bourrer de coups de pied des détenus. Mais l’armée ne fait rien pour soustraire [ces détenus] à la violence des agents : « Les deux [les détenus] sont encore à la station de police d’Al Huryia », note le rapport.
[173:060] - Les forces US cèdent trop facilement à l’usage de la torture. Le cas plus célèbre est bien sûr celui du recours systématique à la torture prison d’Abou Ghraib, à l’ouest de Bagdad.
Mais les documents divulgués rendent compte d’un certain nombre d’abus à plus petite échelle. En Octobre 2006, par exemple, les membres d’un bataillon Stryker ont parlé des abus commis sur des détenus par leur unité, un rapport qui a été transmis à un commandant de niveau supérieur.
Ils ont dit que lorsque des personnes étaient arrêtées, le conducteur avertissait les soldats qu’il était sur le point de s’arrêter brusquement. Les soldats s’accrochaient, tandis que le détenu était projeté vers l’avant. PFC Palmer et un SPC non identifié ont également expliqué comment les soldats [...] battaient à tour de rôle les détenus [...].
Il existe de nombreuses autres mentions de cas où des troupes américaines auraient tabassé des détenus ou menacé de tuer leurs familles.
Pourtant, la grande majorité des accusations concernent des tortures appliquées par les forces de sécurité irakiennes - des abus qui continuent, disent les groupes de défense des droits humains. En effet, Amnesty International a révélé en septembre dernier que les détenus récemment remis aux autorités irakiennes - et d’autres qui pourraient bientôt être remis - « restent exposés au risque de torture et d’autres formes de mauvais traitements ».

Sur le même thème :

22 octobre 2010 - Al Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.aljazeera.net/secret...
Traduction : Info-Palestine.net

dimanche 24 octobre 2010

   Les 400 000 documents classifiés diffusés par WikiLeaks n’apprennent rien aux Irakiens. Pour eux, la mort rode toujours au coin de la rue ; des hommes, des femmes et des enfants sont assassinés, torturés, mutilés, violés dans des prisons, secrètes ou non. Mais, les Irakiens sont tout de même heureux que leurs malheurs soient enfin sur le devant de l’actualité mondiale. Les rapports internes des autorités militaires américaines ont, en effet, le mérite d’attester, partiellement, ce que de nombreux observateurs dénoncent inlassablement depuis 2003.
Pour le pouvoir :
un complot fomenté à l’étranger
 
   Visiblement sur la défensive, Nouri al-Maliki n’a rien trouvé de mieux que d’accuser WikiLeaks de saboter sa campagne électorale, affirmant que la date choisie pour publier les documents n’était pas neutre. Un de ses proches, Haïdar Al-Jourani, est allé plus loin en parlant de complot fomenté à l’étranger (sans dire de quels pays il s’agit). Il a annoncé que le Premier ministre sortant allait porter plainte contre le site Internet pour diffusion de documents mensongers concernant sa participation à des massacres et à des arrestations. Ce n’est pas l’avis du sadriste Hakim Al-Zamili, ancien ministre de la Santé, pour qui WikiLeaks confirme les violations dénoncées par son mouvement sur les violations des droits de l’homme par les forces irakiennes.
   Jawad al-Bolani, ministre de l’Intérieur sortant, particulièrement visé par certains rapports, veut contre-attaquer en créant une commission sur les abus commis par les troupes américaines entre 2003 et 2009. On ne peut que l’approuver. Il est trop facile d’accuser le régime de Bagdad de tous les crimes. Mais ce ne sera qu’une enquête morte-née de plus, les Irakiens ne comptant plus les annonces de ce genre, jamais suivies d’effets.
Les dirigeants irakiens
pourraient être condamnés
pour crime de guerre
 
   Dans l’opposition parlementaire, Oussama Nujaifi, membre important d’Al- Iraqiya, a fort justement constaté que les crimes et les abus documentés par WikiLeaks n’étaient qu’« une petite partie de la réalité de ce qui s'est passé en Irak ». En revanche, il s’est bien gardé d’ajouter qu’Iyad Allaoui, chef de son bloc électoral, est impliqué dans des meurtres qualifiés de crimes de guerre, à commencer par le plus effroyable d’entre eux : le massacre de Fallujah en 2004.
   A la différence de George W. Bush et des troupes étatsuniennes, pour l’instant hors d’atteinte de la justice, car exemptés scandaleusement des domaines relevant de la compétence du Tribunal pénal international, les dirigeants irakiens sont passibles d’une condamnation devant cette juridiction. Pour l’administration américaine actuelle, cette menace pourrait être une façon de les tenir en laisse.
 
Source : WikiLeaks documents, the first reactions in Iraq (Road to Iraq – 23/10/10)
 
Par Gilles Munier

samedi 23 octobre 2010

Révélations WikiLeaks : la sale guerre américaine en Irak

samedi 23 octobre 2010
Gregg Carlstrom - Al Jazeera



Al Jazeera a eu accès à 400.000 documents secrets de l’armée américaine, qui révèlent de l’intérieur l’histoire de la guerre en Irak. 
 
(JPG)

Dans ce qui est la plus grande fuite de secrets militaires de l’histoire, Wikileaks, le site des dénonciateurs, a publié 400 000 secrets américains fichiers détaillant tous les aspects de la guerre en Irak. Al Jazeera en a obtenu copie.
L’ampleur des données contenues dans les dossiers secrets révèle un récit direct de la guerre qui va bien au-delà de toutes les informations sur le conflit jamais diffusées dans le domaine public.
Utilisant des milliers de rapports militaires américains classés [secret défense], Al Jazeera est maintenant en mesure de raconter depuis l’intérieur l’histoire d’une guerre qui a fait des milliers et milliers de morts et a laissé un pays fracturé sur des lignes sectaires.
En collaboration avec le Bureau of Investigative Journalism à Londres ces 10 dernières semaines, Al Jazeera a analysé des dizaines de milliers de documents, trouvant des faits que les États-Unis avaient caché aux regards du public.
Ce qui a été découvert contredit souvent la version officielle du conflit. Par exemple, les données dévoilées montrent que les États-Unis ont fait une comptabilité des morts et blessés irakiens tout au long de la guerre, malgré les déclarations publiques disant le contraire.
La dernière série de fichiers se rapporte à une période de six ans - de janvier 2004, à fin décembre 2009 - et met en évidence que 109 000 personnes sont mortes durant cette période. Parmi celles-ci, 66 081 - soit les deux tiers du total - étaient des civils.
Les chiffres sont beaucoup plus élevés que ce à quoi on s’attendait et ils vont inévitablement conduire à une révision à la hausse du nombre total de décès dans le conflit.
Suite à l’information sur la guerre contenue dans ces documents, l’Iraq Body Count (IBC) - une organisation qui a conservé les informations sur le nombre de personnes tuées - est sur le point de relever ses estimations de morts d’au moins 15 000, passant de 107 000 à 122 000.
Les nouveaux documents jettent une lumière crue sur les horreurs au jour le jour de la guerre. L’armée nomme SIGACTS [significant action reports] les résumés sur le terrain des événements qui ont marqué tout le long du conflit : des raids, des recherches, des attentats à la bombe en bordure de route, des arrestations, et d’autres encore. Ils sont tous classés « secret ».
Les rapports révèlent comment la torture est endémique et la façon dont les simples civils ont eu à souffrir le plus fort du conflit.
Les récits trouvés dans les documents sont horrible : des femmes enceintes abattues à bout portant aux points de contrôle, des prêtres enlevés et assassinés, des gardes dans les prisons irakiennes qui ont recours à des perceuses électriques pour forcer leurs prisonniers à parler...
Tout aussi inquiétante est la réponse de l’armée aux assassinats de civils ses troupes. L’usage excessif de la force n’a quasiment jamais donné lieu à des enquêtes et les coupables sont très rarement traduits en justice.
La vie de certaines personnes pouvant être mise en péril avec la publication de ces données sensibles, nous avons expurgé presque tous les noms qui apparaissent dans ces documents - à l’exception des personnes très bien connues comme le premier ministre irakien Nouri al-Maliki. Nos collgues des autres médias ont fait de même.
Aux côtés du New York Times, du Guardian, du Spiegel, et de la chaîne britannique Channel 4 TV, Al Jazeera est tout à fait clair sur le fait que la communication des dossiers en Irak - en dépit de leur caractère secret - relève de l’intérêt public.
23 octobre 2010 - Al Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.aljazeera.net/secret...
Traduction : Info-Palestine.net

jeudi 21 octobre 2010

   Nouri al-Maliki, Premier ministre irakien sortant, est allé, le 18 octobre,  à Téhéran demander à Ali Khameneï, Guide suprême du régime des mollahs, de soutenir sa réélection. Opération réussie, bien que personne ne sache ce qu’il a cédé pour y parvenir. Comme l’a dit Raouf Sheibani, vice-ministre iranien des Affaires étrangère, Al-Maliki « semble être un des choix appropriés pour l'Irak », en raison de « sa longue expérience à la direction du pays » (1). La Maison-Blanche et le Pentagone en disent officieusement autant, à cette différence près qu’aux Etats-Unis l’influence dont disposerait Moqtada al-Sadr dans le prochain gouvernement pose plus de problèmes qu’à l’Iran.
   Pour James F. Jeffrey, ambassadeur des Etats-Unis à Bagdad (2), Moqtada est une menace pour le « processus démocratique », car il ne fait « pas de distinction entre les moyens politiques pacifiques et l'intimidation violente » (3). Rick Francona, ancien agent de renseignement  qui a bourlingué pour la DIA et la CIA au Liban, en Irak et en Syrie depuis la fin des années 70, va plus loin en conseillant, sur son blog (4), de se méfier de Nouri al-Maliki.
   Le Guide suprême iranien devrait donc ordonner à ses troupes d’occupation – Gardiens de la révolution et milices – de reconfigurer leurs activités terroristes, et à Adel Abdel-Mahdi – candidat Premier ministre du bloc chiite INA - de rentrer dans le rang. Un rappel disciplinaire devrait être transmis à Ammar al-Hakim, jeune chef du Conseil Suprême Islamique d’Irak (SCRI) qui se sent pousser des ailes, pour lui faire comprendre qu’un accident est vite arrivé… qu’il a un frère pour le remplacer.
   Les Kurdes exigent toujours des engagements écrits d’Iyad Allaoui, de Nouri al-Maliki et d’Adel Abdel-Mahdi aux 19 demandes qu’ils ont formulés, comprenant notamment l’annexion à terme de Kirkouk et de territoires dits contestés. Ils craignent que leurs interlocuteurs ne les respectent pas. Comment le pourraient-ils ? Au nord, les Arabes et les Turcomans ont votés majoritairement pour les candidats d’Iraqiya (Iyad Allaoui) ou des listes sadristes (membres de l’Alliance Irakienne Unifiée - INA). Pour Jawher Namiq Salim, Président du parlement kurde élu en 1992 (après le soulèvement organisé en collaboration avec la CIA), l’avenir du Kurdistan irakien s’annonce sombre. Il a vu Al-Maliki à l’œuvre et Iraqiya, dit-il, est « une base du chauvinisme arabe, de  racistes, tous anciens baasistes » (5)…
A suivre…
 
Note :
 
 (1) Maliki en Iran pour rallier des soutiens à sa candidature (L’Orient-Le Jour -19/10/10)
 
(5) James F.Jeffrey a été n° 2 à  l'ambassade des Etats-Unis à Bagdad de juin 2004 à mars 2005, puis chargé d'affaires de mars à juin 2005
.
 (3) Iraq’s leader gain crucial ally, but his constituents are wary, par Leila Fadhel (Washington Post - 11/10/10)
 
(4) Iraq – the concequence of anather term for al-Maliki, par Rick Francona
 
(5) Prominent Kurdish Figure Says Kurdish Future is Not Optimistic in Iraq
http://www.rudaw.net/english/kurds/3225.html
 
Précédent épisode :
La foire d'empoigne parlementaire

par Gilles Munier 

mercredi 20 octobre 2010

Afghanistan, vers le retrait

mardi 19 octobre 2010
Alain Gresh
Le Monde diplomatique

La guerre d’Afghanistan est entrée dans sa dixième année : elle a commencé le 7 octobre 2001, les troupes américaines et britanniques lançant leur attaque contre le régime des talibans, un mois après les attentats de New York et Washington. 
 
(JPG)
Rapatriement des corps des derniers soldats italiens tués en Afghanistan

L’objectif affiché était d’en finir avec le pouvoir du mollah Omar et de démanteler « les réseaux terroristes ». Cette offensive s’inscrivait dans ce que l’administration Bush appelait « la guerre contre le terrorisme » et qui allait se déployer en Irak, puis au Liban durant la guerre israélienne de l’été 2006.
Les résultats sont connus et, sans entrer dans les détails, on peut en tracer les traits principaux :
-  extension de l’influence des talibans en Afghanistan, qui contrôlent désormais une partie importante du territoire et mobilisent plus largement au nom de la lutte contre l’invasion étrangère ;
-  extension des combats au Pakistan où les talibans locaux mènent une lutte déstabilisatrice contre le pouvoir et l’armée accusés de collaborer avec les Etats-Unis ;
-  implantation d’Al-Qaida en Irak où l’organisation n’avait aucun relais avant la guerre de 2003 ;
-  renforcement des réseaux qui se réclament d’Al-Qaida et qui, du Liban à la Somalie, en passant par le Yémen s’engagent militairement contre les troupes américaines et leurs alliés.
Plus largement, la guerre contre le terrorisme a aggravé la déstabilisation de la région, au détriment même des intérêts des Etats-Unis.
L’enlisement et l’aveuglement qui ont marqué la politique américaine en Afghanistan, politique suivie sans état d’âme par la France, vont-ils prendre fin ? Les Etats-Unis préparent-ils leur retrait et laisseront-ils aux Afghans la possibilité de régler leurs propres problèmes ?
Au moins, un débat se déroule au sein de l’administration américaine, comme le livre de Bob Woodward, Obama’s Wars, le montre. Dans un article qui évoque cet ouvrage, Robert Dreyfuss (« Woodward : Obama Wants Out of Afghanistan », The Nation, 22 septembre - à partir de ce que différents journaux ont publié, le livre n’étant pas à l’époque disponible) cite une des déclarations d’Obama en 2008 à ses généraux qui demandaient un engagement plus soutenu :
« En 2010, nous ne devrons plus avoir une conversation sur la façon de faire plus. Je ne veux pas entendre, “Nous allons bien, Monsieur le Président, mais nous serions mieux si nous en faisons plus.” Nous n’allons pas avoir une conversation sur la façon de changer [la mission]... à moins que nous parlions de la façon de nous retirer plus rapidement que prévu en 2011. »
Le livre semble confirmer la volonté du président Obama de se sortir du bourbier afghan.
Deux informations récentes, toutes deux rapportées par l’International Herald Tribune (15 octobre) (les liens hypertextes sont faits avec les articles publiés sur le site électronique du New York Times) éclairent le contexte et confirment cette impression. La première concerne le contingent espagnol (l’Espagne s’est retirée d’Irak après la victoire des socialistes en 2004 mais continue à participer aux combats en Afghanistan). L’article raconte l’histoire d’un soldat mort au combat, dont la particularité était qu’il n’avait pas la nationalité espagnole, mais... colombienne. (Rachel Donadio et Dale Fuchs, « A Casualty Both of War and the Spanish Economy »). On y aprend que 7 % de l’armée espagnole est composée d’étrangers, poussés à s’engager par la crise économique et par la perspective (non automatique) d’acquérir la nationalité espagnole. Comme sa mère l’indique aux journalistes, on le considérait plus comme « un mercenaire » que comme un soldat. Depuis le 11 septembre 2001, l’armée américaine aussi a largement fait appel à des volontaires étrangers. Je citais en décembre 2006, dans un envoi intitulé « L’armée américaine à la recherche de volontaires étrangers », un journal américain :
« A l’heure actuelle, la politique du Pentagone stipule que seuls les immigrants légaux résidant aux Etats-Unis ont le droit de s’enrôler. On compte aujourd’hui 30 000 non-citoyens qui servent dans les forces armées américaines, soit 2 % des effectifs d’active (...) Environ une centaine de non-citoyens sont morts en Irak et en Afghanistan. Un récent changement de la loi américaine donne au Pentagone l’autorité d’amener des immigrants aux Etats-Unis s’il les considère comme vitaux pour la sécurité nationale. Jusqu’à présent, le Pentagone n’a pas utilisé ce changement, mais la pression s’accroît pour qu’il utilise cette nouvelle possibilité. Certains penseurs militaires hauts placés pensent que les Etats-Unis devraient recruter des étrangers dans leur pays d’origine. »
Quand une nation prétend engager une guerre vitale, au nom de la liberté et des grands principes, mais sont incapables de trouver assez de soldats « nationaux » pour les mener, cela pose, c’est le moins qu’on puisse dire, problème.
La deuxième information donnée par le quotidien américain confirme l’appui de Washington et de l’OTAN aux négociations secrètes menées par le pouvoir afghan avec les talibans (Helen Cooper et Dexter Filkins, « Push on Talks With Taliban Confirmed by NATO Officials »). Les Etats-Unis ont permis à d’importants responsables des talibans d’assister à des réunions à Kaboul, révèlent les journalistes qui se sont vu confirmer par des responsables militaires américains que la réconciliation était une dimension clef de la guerre qu’ils menaient. Dans le même temps, l’OTAN intensifie ses opérations militaires, notamment en utilisant les drones pour tuer d’autres responsables talibans et contraindre les talibans à négocier. Quoiqu’il en soit, il semble bien qu’un processus s’est mis en route pour aboutir à un gouvernement d’union nationale et au départ des troupes étrangères. Bien sûr, le chemin sera long, mais il semble bien que Washington a pris conscience que cette guerre ne pouvait pas être gagnée. Il aura fallu dix ans de combats, de morts, de destruction, de déclarations enflammées sur les femmes afghanes, sur le fait que nos soldats se battaient là-bas pour éviter que les combats s’étendent dans nos banlieues...

(JPG) Du même auteur :

17 octobre 2010 - Les blogs du Diplo
Vous pouvez consulter cet article à :
http://blog.mondediplo.net/2010-10-...